En réponse à une question écrite du sénateur Jean Louis Masson sur le problème des noms de communes enregistrés en « .com » par des tiers non-autorisés, la ministre de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi vient de rappeler les moyens juridiques dont une commune dispose pour récupérer son nom de domaine. Tout d’abord, une distinction doit être établie entre les noms de domaine nationaux « .fr » et tous les autres noms de domaine. Concernant les premiers, le nouvel article R.20-44-43-II du Code des postes et des communications électroniques (décret 2007-162 du 6 février 2007) dispose que « sauf autorisation de l’assemblée délibérante, le nom d’une collectivité territoriale […], seul ou associé à des mots ou abréviations faisant référence aux institutions locales, peut uniquement être enregistré par cette collectivité [?] comme nom de domaine au sein des domaines de premier niveau correspondant au territoire national ». A cet égard, il peut être également observé que selon la charte de l’Afnic (Association française pour le nommage internet en coopération), office d’enregistrement en charge de la zone de nommage « .fr », les noms des communes françaises dans leur forme canonique (forme minimale réduite) font partie des termes réservés. Leur enregistrement est soumis à des conditions particulières, liées à l’identité, au statut ou à la nature du demandeur. Ces dispositions protectrices ne sont pas applicables aux noms de domaine enregistrés sous d’autres extensions que celle correspondant au territoire national, tel le « .com ».
Pour autant, les collectivités territoriales ne sont pas dépourvues de toute action à l’encontre d’un éventuel usurpateur. Si une collectivité territoriale est titulaire d’une marque, elle peut engager une procédure extra-judiciaire de résolution des conflits devant un centre d’arbitrage compétent, notamment le centre d’arbitrage de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (Ompi), sous réserve de respecter les conditions particulières inhérentes à une telle procédure. En l’absence de marque, ou dans le cas où la procédure alternative de résolution des différends ne peut pas être engagée, une collectivité territoriale peut se prévaloir des dispositions de droit commun de la responsabilité civile (art. 1382 du Code civil) et s’appuyer sur l’article L711-4 h) du Code de la propriété intellectuelle. Ce dernier reconnaît un droit au nom pour les communes. Selon la jurisprudence dominante rappelée par la ministre, la collectivité territoriale doit alors démontrer un risque de confusion entre le site exploité sous le nom de domaine contesté et ses propres attributions, ou une atteinte à son image, à sa renommée ou démontrer l’absence de droit ou d’intérêt légitime du tiers non-autorisé. Enfin, il convient de compléter la jurisprudence recensée par la ministre, en ajoutant un arrêt récent de la cour d’appel de Paris rendu le 12 décembre 2007 (ville de Paris c. Stéphane S.). Dans cet arrêt qui intensifie la protection du nom des collectivités territoriales, la cour d’appel considère qu’à l’instar d’une personne physique ou morale, une collectivité territoriale est en droit de protéger et de défendre son nom contre toute exploitation commerciale injustifiée, notamment lorsqu’un tiers, en déposant une marque, sera susceptible de lui causer un préjudice soit en l’empêchant de tirer profit de la commercialisation de son nom, soit en nuisant à son identité, son prestige ou sa renommée.
auteurs : Claudine Salomon, Anne-Sophie Cantreau / Cabinet Alain Bensoussan
Source Localtis