Parmi les définitions du mot « marque », en voici une : « La marque est un signe distinctif qui permet à un consommateur de distinguer un produit ou service comme celui d’une entreprise parmi tous ceux proposés sur le marché. Ce signe distinctif peut être matérialisé par un nom propre, un mot, une expression, un symbole visuel, un son ou la combinaison de plusieurs d’entre eux. Aux yeux du consommateur, la marque constitue un repère ou une garantie. La marque est un élément constitutif du fonds de commerce et a une valeur patrimoniale. »
Développer son nom, sa notoriété et par conséquent sa marque prend plusieurs années à un entrepreneur. Internet a cependant raccourci très nettement ces délais. Concrétiser ses efforts par le dépôt de sa propre marque est primordial pour qui veut préserver son patrimoine. Malheureusement, la protection de sa marque ne peut pas se faire à l’échelon mondial en une seule fois. Un dépôt à l’INPI (inpi.fr) protège sur la zone France, tandis qu’un dépôt à l’OHMI (oami.europa.eu) protège en Europe. Pour se protéger à l’échelon mondial, l’OMPI (wipo.int) existe et doit impérativement être contacté par l’intermédiaire de l’INPI. Un guide existe auprès de l’APCE : apce.com/pid835/deposer-une-marque.html. La procédure d’inscription INPI est fastidieuse, ce qui peut rebuter. Il est cependant important de le faire.
La France, un pays protégé
Concrètement, si une marque n’est pas protégée, n’importe qui peut l’utiliser à son propre profit, tout particulièrement sur Internet. Les moteurs de recherche ont des politiques de protection qui diffèrent en fonction des pays. Google publie la liste des pays « non protégés » à l’adresse adwords.google.com/support/aw/bin/answer.py?answer=144298. La France fait partie des pays protégés.
Pour illustrer ceci, imaginons un hôtel ayant déposé sa marque en France (par exemple « hôtel wxcvbn »). Cet hôtel peut interdire à quiconque d’acheter le mot clé « hôtel wxcvbn » sur google.fr. Ceci veut dire que lors d’une recherche sur le mot clé « hôtel wxcvbn » sur Google France, aucun lien payant n’apparaitra, sauf si l’hôtel décide d’enchérir sur son propre nom commercial. La protection INPI n’a cependant aucune incidence sur le référencement naturel sur les différents moteurs de recherche ou annuaires (Google, Yahoo, Bing…) ni sur le référencement payant dans d’autres pays (google.com, google.co.uk, google.de…). Dans ce contexte, un client qui recherche par son nom un hôtel dont la marque n’est pas protégée va trouver une multitude de liens payants dont la quasi-totalité va diriger le client vers un site de distributeur qui prélèvera au passage une commission entre 10 et 30 % du séjour. L’hôtelier voit donc sa propre clientèle captée par des intermédiaires auxquels il va verser une rémunération. Une autre utilisation peut également être faite : le « position squatting », une méthode qui consiste pour un concurrent à détourner vers son site les internautes qui cherchent une autre marque.
Un équilibre à trouver
On ne peut pas dire que ces distributeurs n’utilisent que cet artifice pour trouver des clients, ni que 100 % des clients qui cherchent spécifiquement l’hôtel vont passer par un de ces distributeurs, pourtant, chez une multitude d’hôteliers, le préjudice peut se chiffrer en milliers d’euros ou en dizaines de milliers d’euros de commissions. Il faut également souligner que ces mêmes distributeurs font des efforts marketing pour promouvoir les hôtels qu’ils distribuent. Des études ont montré que bon nombre d’internautes -certains l’estiment à 50 %- qui ont identifié sur un portail de distribution (Booking, Venere, Laterooms, HRS, Hotel.info, Expedia, Orbitz, RatesToGo, Last minute…) un hôtel vont tenter de trouver ce même hôtel sur d’autres canaux, y compris le propre site de l’hôtel. Le distributeur améliore la e-présence & la e-notoriété de l’hôtel et parfois sa e-réputation, notamment quand le distributeur dispose de son propre système de notation par les clients, et permet à l’hôtel de gagner en direct des clients qu’il n’aurait peut être jamais eus. D’un autre côté, le distributeur peut gagner des clients qui cherchaient spécifiquement cet hôtel. Il y a un équilibre à trouver, chaque cas étant unique. En 2009, le déséquilibre est cependant très favorable aux distributeurs aux gros moyens financiers.
Les affiliés sont sur des niches de marché
Ces mêmes distributeurs utilisent l’affiliation comme un moyen de développer leurs ventes : ils fournissent à des propriétaires de sites Internet divers la technologie de réservation. En contrepartie, ces propriétaires de sites Internet divers partagent la commission du distributeur dès qu’une réservation est effectuée sur leur site grâce à la technologie du distributeur. Classiquement, le pourcentage de commission versé à l’affilié augmente avec le volume d’affaires qu’il apporte, même si tout ceci n’est jamais communiqué à l’hôtelier. Pour un distributeur, le nombre d’affiliés peut se compter en milliers. Certains affiliés sont très spécifiques et se limitent par exemple à un quartier, une région ou à une période de l’année tandis que d’autres sont globaux. Si l’hôtel n’a pas protégé sa marque, les affiliés d’un distributeur vont enchérir sur Google séparément sur le nom commercial de l’hôtel. Sur certains hôtels, notamment à Paris, on peut voir une vingtaine de liens commerciaux (sur 2 pages) avec 5 ou 6 liens commerciaux « frères » car provenant indirectement du même distributeur. La force de l’affiliation tient au fait que beaucoup d’affiliés sont sur des niches de marché et qu’ils y sont souvent très forts. Ils captent donc des clients qui ne cherchaient pas forcément un hôtel mais qui vont le réserver à l’occasion d’une recherche sur une activité sportive, artistique, événementielle, festive, religieuse, politique, sociologique…
Diffusion sur plusieurs sites
Dans ces conditions, l’hôtelier qui a signé un seul contrat se retrouve diffusé sur plusieurs centaines de portails et sites Internet, sans l’avoir forcément compris. Quand l’hôtelier a signé des contrats avec plusieurs distributeurs, son hôtel se trouve présent sur des centaines ou milliers de sites Internet à travers le monde. Quand tout se passe dans le cadre du contrat et que chaque site ne présente pas d’équivoque quand au fait que le site n’est pas le site officiel de l’hôtel, on peut estimer que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Pourtant, on pourrait légitimement penser que l’hôtel devrait être informé des sites sur lesquels il est présent. Très peu de distributeurs lèvent cette opacité et on peut citer hostelworld.com (groupe WRI) qui permet à un hôtelier de savoir précisément sur quel site a été enregistrée chaque réservation.
Attention au cybersquatting
Il existe d’autres catégories de sites Internet dont les pratiques sont pénalement répréhensibles, notamment le cybersquatting qui peut lui-même prendre plusieurs formes. Prenons un exemple fictif : un hôtelier a acheté un nom de domaine hotel-azerty-montpellier.com et y a installé de bonne foi son site Internet. Une autre personne va acheter le nom de domaine hotelazertymontpellier.com ou montpellierhotelazerty.com, va y afficher un contenu qui ressemble à celui du vrai site www.hotel-azerty-montpellier.com ou qui en est parfois une copie pure et simple, va y indiquer « SITE OFFICIEL », va brancher un moteur de réservation en affiliation ou parfois avec un contrat direct avec l’hôtelier qui n’a pas compris ce manège. Ce cybersquatteur va donc gagner des commissions sur chaque vente réalisée. A l’échelle d’un hôtel, le préjudice reste raisonnable. Certaines chaînes hôtelières en ont fait les frais avec à la clé des préjudices en millions d’euros ou de dollars, ces cybersquatteurs étant très difficiles à localiser car passant par des entreprises fantômes dans des paradis fiscaux. Une autre forme de cybersquatting consiste à mettre sur un nom de domaine qui ressemble à www.hotel-azerty-montpellier.com du contenu qui n’a strictement rien à voir, afin de détourner du trafic du vrai site vers le faux et « forcer » le propriétaire du vrai site à payer à prix d’or le ou les nom(s) de domaine squattés.
Le typosquatting est une autre technique qui consiste à acheter les noms de domaine qui diffèrent du vrai nom de domaine par une faute d’orthographe, une lettre manquante ou une faute de frappe, par exemple www.hotel-azerti-montpellier.com ou www.hotel-azerty-montpelier.com. Quand l’hôtelier s’en rend compte, récupérer ces noms de domaine demande de porter plainte et de contacter le registrar (organisme habilité à enregistrer les noms de domaine sur Internet, par exemple Gandi ou GoDaddy…).
Il existe enfin une catégorie de portails Internet de réservation d’hôtel qui publient des centaines ou des milliers d’hôtels sans avoir de contrat direct et sans être affilié à un distributeur ayant un contrat avec l’hôtel. Ces sites on bien souvent des contrats avec un certain nombre d’hôtels, même si ce pourcentage est difficile à évaluer de l’extérieur. Pour couronner le tout, l’hôtel est réservable en ligne, bien souvent avec un prix affiché supérieur à celui pratiqué par l’hôtelier lui-même et le client a intégralement prépayé le séjour au distributeur. Quand le client arrive à l’hôtel, il apprend que l’hôtel n’a jamais reçu sa réservation et n’a pas de contrat avec ce site. Ces sites ont tendance à passer par des paradis fiscaux ou pays à la législation laxiste : Monaco, Suisse, Luxembourg, Roumanie…
Protéger sa marque est primodial
Protéger sa marque ne se fait plus uniquement de manière classique. Avec l’avènement des réseaux sociaux, protéger sa marque sur ces réseaux est primordial. Même si vous ne savez pas pourquoi ni comment utiliser une page Facebook aujourd’hui, protéger votre marque sur Facebook est urgent et important, avant que quelqu’un d’autre ne le fasse. Les réseaux généralistes qui sont incontournables peuvent être résumés à Twitter, Facebook, Youtube, Myspace, Flickr. Il existe bien évidemment une multitude d’autres sites communautaires, chacun ayant son propre type de communauté et d’usage Pour cela, il suffit d’aller sur chacun de ces sites et créer une page. Quand le site le permet, créer une page « business » plutôt qu’une page « perso ». Le jour où vous mettrez en place des actions marketing destinées à ces réseaux, votre marque aura été protégée et vous en serez ravi.
Vérification systématique de séjour du client
Dernière catégorie qui déborde sur l’utilisation des marques : les sites de commentaires client, avec en tête Tripadvisor.com ou Trivago.com. Les internautes se sont accaparés le droit de commenter leurs expériences hôtelières ce qui est au final une très bonne chose pour les bons hôtels. Ces sites diffusent cependant de fausses informations à leur insu, ces faux commentaires ayant été ajoutés par des concurrents ou d’anciens employés. L’action de ces commentaires sur la notoriété de l’hôtel a une incidence réelle sur la marque, tout particulièrement quand l’hôtelier ne dispose pas d’un vrai droit de réponse ou d’un droit de retrait. Dans ce contexte, Trivago.com a une politique beaucoup plus souple que ces concurrents : d’une part l’hôtelier dispose d’un droit de réponse, mais d’autre part les autres membres de la communauté peuvent eux-mêmes juger du bienfondé d’un commentaire et demander son retrait du site, tout particulièrement quand ce commentaire est l’unique participation d’un nouveau membre. L’association HTNG (htng.org) est actuellement en train de sonder les acteurs (hôteliers, PMS, sites clients) afin de mettre en place une vérification systématique de séjour du client : quand un internaute voudra déposer un commentaire, il devra indiquer un ou plusieurs éléments qui permettront au site de se connecter au PMS (logiciel hôtelier) et de valider s’il a oui ou non séjourné à l’hôtel.
Surveiller sa marque, tout simplement
A l’instar d’autres problèmes actuels, les problèmes liés aux marques et à la contrefaçon ne peuvent être réglés à un simple niveau national. Pourtant chaque pays peut faire progresser la loi à sa « petite » échelle et montrer l’exemple à la communauté internationale.
Surveiller sa marque est une des nouvelles tâches d’un hôtelier. Recenser à échéances régulières les sites Internet qui diffusent des informations sur l’hôtel et/ou vendent ses chambres est le seul moyen de constater les phénomènes de squatting. Analyser le contenu diffusé est également important, tout particulièrement les aspects négatifs. C’est également un moyen de mieux connaître les centres d’intérêts des internautes-clients, ce qui va permettre à l’hôtelier d’améliorer son propre site Internet en adressant par exemple des niches de marché. Toutes les plus grandes marques (industrielles, alimentaires, services…) ont recours à des cabinets externes aux outils puissants pour surveiller et recenser l’utilisation de leur marque.
source lhotellerie-restauration.fr