Cette semaine les membres de l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers), l’organisation chargée de superviser la gestion des suffixes Internet, se sont réunis à Séoul en Corée du Sud. Outre l’introduction de caractères non-latins au sein des URL, le gros dossier en cours concerne bien entendu l’ouverture des extensions des noms de domaines. En juin 2008 l’ICANN avait annoncé son souhait de libéraliser les extensions de noms de domaine (TLD). Cette initiative a pour but de relancer le marché en permettant aux entités commerciales de créer elles-mêmes leur(s) extension(s) web pour revendre par la suite les noms de domaine associés.
Si la troisième version du cahier des charges était très attendue, celle-ci n’a cependant pas manqué de décevoir. En effet Stephen Van Gelder, membre du conseil du GNSO, nous explique qu’il n’existe plus de calendrier précis pour l’ouverture de ces nouvelles extensions alors que la version finale du cahier des charge était attendu pour ce mois de décembre. « Beaucoup souhaitaient obtenir des dates pour faire avancer leurs projets auprès des investisseurs », explique M. Van Gelder, avant d’ajouter qu’il y aura très probablement une quatrième version de cette feuille de route publiée au mois de décembre avant que les choses soient finalisées début 2010.
Loic Damilaville, adjoint au directeur général de l’AFNIC, l’association française chargée du nommage de la zone .fr, ajoute que le ton a été donné dès le début par le directeur de l’ICANN Rod Beckstrom. Ce dernier souhaite tout d’abord résoudre d’autres problèmes majeurs. « Il y a par exemple les problèmes liés aux marques déposées », déclare M. Damilaville. En effet, le cyber-squatting est un très gros problème pour les entreprises mais également pour les nations. Le représentant de l’AFNIC ajoute : « certains pays se sont aperçus trop tard que leur nom de domaine avait déjà été enregistré. Cette fois ils se montrent plus réactifs ».
Parmi les autres problèmes évoqués lors de ce sommet Rod Beckstrom souhaite également améliorer la sécurité de la racine Internet. « Une étude a été menée juste avant le sommet et les experts préconisent plutôt une mise en place des gTLD en 2012, celles-ci n’étant pas prioritaires », explique Stephane Van Gelder. Il précise que le comité scientifique de l’ICANN estime pour sa part pouvoir sortir une centaine de gTDL tout de suite. « Au niveau technique, la question se pose de savoir si l’on peut ouvrir ces extensions d’un coup ou si le processus doit se faire en douceur », précise M. Damilaville.
Finalement, c’est l’existence-même de ces nouvelles extensions qui semble également avoir été remise en cause. En effet, si ces dernières ont été largement préconisées par les bureaux d’enregistrements (principalement à des fins commerciales), aucune étude de marché n’a été menée en amont pour déterminer la pertinence de ces dernières auprès des internautes. « Dans certains cas on observe une forte demande par exemple pour le .cat ou le .bzh qui a recueilli 20 000 signatures sur Internet », déclare M. Damilaville en précisant que certains bureaux d’enregistrement s’interrogent aussi sur la rentabilité de la mise en place de certaines extensions.
Face à ces problèmes, plusieurs solutions ont été évoquées, par exemple l’ouverture progressive des dossiers de candidature avec un traitement de ces derniers par catégories (candidatures des villes, des entreprises…). Stephane Van Gelder affirme : « chaque catégorie présente des problèmes techniques et de propriété industrielle différents », avant d’ajouter : « mais l’ICANN ne veut rien entendre ». L’ouverture des candidatures permettrait également de rassurer les investisseurs de certains projets mais aussi de traiter dès maintenant les dossiers concurrents sur une même extension en amorçant tout de suite les discussions.
Notons enfin les problèmes liés à la migration vers l’IPV6. Au travers d’une étude il avaient été révélé que le nombre d’adresses Internet atteindrait sa limite en 2011. Si le protocole IPv4 permet d’utiliser un peu plus de quatre milliards d’adresses différentes, l’IPV6 en offre pour sa part 3,4×10^38. L’ICANN lance quelques tentatives de sensibilisation mais le processus n’avance pas de manière significative. Aujourd’hui les Etats-Unis détiendraient deux tiers des adresses Internet, contre 15-20% en Europe et 10% en Asie. « Il existe un marché parallèle de l’IPV4 », affirme Loïc Damilaville, « les grandes entreprises bien fournies essaient de les revendre mais c’est interdit ».
Outre l’introduction de caractères non-latins au sein des URL (une initiative particulièrement demandée par la Russie), le sommet de l’ICANN semble finalement avoir déçu. Reste à connaître la nature du prochain cahier des charges qui devrait être publié en fin d’année.
Source NetEco.com